Je suis engagé dans le service que dirige à l’époque Janine Langlois-Glandier [1]. En fait, Jean-Charles Edeline recommande des quantités de gens qui le croisent quotidiennement et le responsable du personnel ne donne généralement pas suite...
Mais il faut croire que j’ai une bonne tête et quelques compétences car je suis engagé comme "occasionnel", pour une durée d’un mois. Et par la suite, mon contrat est renouvelé tous les mois. Janine Langlois-Glandier me dit souvent : "Christian, si vous trouvez mieux ailleurs, n’hésitez pas...". Elle est horrifiée quand elle apprend que j’ai loué un appartement juste en face des Buttes Chaumont, rue du Plateau. Inconscience ou foi dans mon destin, j’ai même acheté des meubles à crédit !
Mais à force de persévérance, je suis engagé un an plus tard comme assistant de direction, doté d’un contrat à durée indéterminée.
Le service a différentes missions et je travaille dans un secteur qui s’occupe de la réglementation et des négociations avec les partenaires sociaux. Curiosité juridique, lors des grandes lois de 36 sur le temps de travail, on a omis le secteur audiovisuel dans les décrets d’application de la durée du travail. La SFP, comme l’ORTF avant elle, a donc ses propres dispositions concernant le temps de travail. Certes, ces dispositions sont très proches des décrets de 36, mais il faut constamment les mettre à jour et adapter leur application. Héritière de la fonction publique, la SFP doit gérer un nombre considérable de primes et indemnités. Une de mes premières tâches consiste à concevoir une bible des primes et indemnités qui rassemble tous les avantages des salariés, avec montants, conditions d’application, dates des décisions successives, etc.
En 1978, Jean-Charles Edeline est remplacé à la tête de la SFP par Antoine de Clermont-Tonnerre, un haut fonctionnaire dont la mission est de réduire la voilure de la SFP. Il annonce un plan de 500 licenciements. Immédiatement, la SFP entre dans une crise grave. La direction quitte les Buttes Chaumont et s’installe au théâtre de l’Empire. Ou pourrait dire "campe" car le lieu n’est pas vraiment prévu pour. Mais ce lieu est choisi pour que les négociations avec les syndicats puissent se dérouler dans une certaine sérénité, loin de l’agitation des Buttes Chaumont. Personnellement, j’effectue presque tous les jours la navette entre mon bureau aux Buttes Chaumont et l’Empire. C’est une période un peu folle, qui me marque profondément. Commencer sa carrière par un plan social est une épreuve.
Autre grand moment de cette période, la négociation en 1981 de la convention collective commune de l’audiovisuel français. François Mitterrand vient d’être élu président de la République et il souhaite que tous les intervenants de l’audiovisuel aient les mêmes avantages, pour éviter une pression entre salariés de l’ex-ORTF et intermittents du spectacle, corvéables à merci. Les négociations vont durer plusieurs années. Elles se déroulent à la Maison de Radio-France et sont animées alternativement par chacun des PDG des sociétés publiques. L’occasion pour moi de faire la connaissance d’un homme remarquable : Jean-Noël Jeannenet, PDG de Radio-France à l’époque. Durant des mois, la négociation bute sur... l’article 1 "Champ d’application". Bel exercice de sur-place. Le pouvoir accepte d’uniformiser les statuts des salariés de l’audiovisuel public mais de là à étendre ce statut plutôt avantageux à l’ensemble des acteurs du secteur...
En 1982, Janine Langlois-Glandier est nommée secrétaire générale de la SFP. Elle passe les clefs de son service à Maxime Lefebvre, qui vient de l’INA. C’est clairement le meilleur "patron" que j’ai eu dans toute ma vie professionnelle. Je prends alors la direction du service de la réglementation.
Mais j’ai très envie de faire de la production. Mon métier est administratif et je suis loin du fameux pupitre du Podium électronique d’Europe 1...